FESCI : Syndicat estudiantin ou ennemi de la cohésion sociale dans les universités, lycées et collèges  ? Analyse

La fédération estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire est née dans les années 1990 avec pour secrétaire général Martial Ahipeaud. L’organisation s’est donnée pour mission de lutter pour l’amélioration des conditions d’études des élèves et étudiants. La fédération estudiantine et scolaire de la Côte d’Ivoire (FESCI) vient de connaître l’élection de son secrétaire général Sié Kambou sous fond de crise.

 Née pendant la période du parti unique, elle a été à l’origine de plusieurs soulèvements des étudiants qui ont entraîné plusieurs morts d’hommes. Le plus marquant et qui est resté dans l’histoire de la Côte d’Ivoire est le meurtre de l’étudiant Thierry Zébié soupçonné de collaborer avec le gouvernement du père fondateur Félix Houphouet Boigny, Président du parti unique, le parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) contre les intérêts des étudiants

L’histoire de cette organisation est par ailleurs marquée par des affrontements entre policiers et étudiants, également entre étudiants membres de la Fesci ainsi que d’autres organisations estudiantines. La Fesci est elle-même confrontée à des crises internes, des crises liées au leadership. Celle qui est restée dans la mémoire collective est ‘’ la guerre des machettes’’. Cette crise a endeuillé des familles, fait plusieurs blessés. Ce qui a entraîné la fermeture des cités universitaires par le gouvernement ivoirien. Traitée de mafia au sein des cités universitaires, elle est accusée de pratiquer le racket des commerçants aux abords et au sein des cités universitaires. 

Dans une enquête réalisée par le journal le Monde, un étudiant interrogé sur l’accès à une chambre universitaire affirmait sous le couvert de l’anonymat  que la FESCI exigeait aux étudiants d’être membre du syndicat pour avoir une chambre au risque de se faire bastonner ou se faire menacer avec une arme blanche. Vrai ou faux, on ne le sait pas. L’organisation s’arroge le droit de faire arrêter les cours dans les universités, les lycées et collèges et va jusqu’à déloger leurs amis étudiants et élèves pas concernés par leurs revendications

La Fesci devrait être en principe une simple association sous la tutelle ou le contrôle des autorités universitaires et des responsables des établissements scolaires. L’objet de leur présence dans le temple du savoir est d’apprendre, acquérir la connaissance, pour devenir les futurs cadres du pays et pouvoir se prendre en charge dans l’avenir. Il revenait aux responsables universitaires et responsables d’établissements publics d’être la courroie de transmission de leurs revendications auprès des ministères en charge.      

Les actions de la fédération estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire qui devaient plutôt apporter de l’espoir à leurs amis apprenants, à semer la peur au contraire. L’organisation a-t-elle dévié de sa trajectoire, de sa mission première ? C’est la question que l’on se pose quand on voit et observe certaines de ses actions. Personne ne veut avoir affaire à elle, les voix se lèvent pour exiger sa dissolution. Leurs actions ont fait naître des ressentiments à son égard, et ont fait germer des sentiments d’appartenance, d’où la survenue de conflits avec d’autres organisations estudiantines et même des riverains de certaines communes d’Abidjan. Sur le réseau social Facebook, les commentaires contre cette organisation sont virulents et sans équivoque, tous souhaitent sa disparition.

Un rapport de Human Rights Watch publié sur son site, mentionne que la Fesci a été de tout temps assimilée comme bras séculier de l’opposition en particulier celui du front populaire ivoirien dirigé en son temps par Laurent Gbagbo, ancien président et fondateur du parti. Cela s’explique par le fait que la Fesci est née dans la période du parti unique et au moment de la naissance du multipartisme. Les années 1990 ont été des années très mouvementées sur le front social, plusieurs responsables de la Fesci ont dû travailler dans la clandestinité pour imposer son existence. Elle a été constamment confrontée aux brimades policières sous le régime du PDCI et avait été dissoute. Ce qui a été dans un certain sens un facteur de son caractère violent étant confronté constamment aux forces de l’ordre dans leur lutte. La fédération estudiantine et scolaire à fait l’objet de convoitise des partis politiques, d’où l’infiltration de la politique en son sein et la crise des machettes. Richard Banégas disait au cours d’une interview sur www.information.tv5monde.com  ’’C’est une grande famille qui a connu, en effet, des violences internes extrêmement fortes et, notamment, ce moment où plusieurs factions de la Fesci se sont opposées dans cette guerre des machettes.

À l’époque vient d’avoir lieu le coup d’État du général Gueï fin 1999 et la Fesci se divise, pour schématiser, entre partisans de  Laurent Gbagbo et partisans d’Alassane  Ouattara.

Mais l’enjeu est aussi le contrôle des cités universitaires. Il faut bien comprendre que la Fesci est alors une espèce d’État dans l’Etat. Elle contrôle en partie les campus par la violence, c’est elle qui contrôle les cités Universitaires, les restaurants universitaires également, tout cela par la violence ! Le moindre vendeur de rue installé dans les cités Universitaires ou aux abords dépend, lui aussi, du bon vouloir des secrétaires généraux de la Fesci’’. À la FESCI les secrétaires généraux ou secrétaires de section sont parés du titre de “général” une identité d’inspiration paramilitaire et prennent un pseudonyme. Guillaume Soro était le “général bogota, Charles Blé Goudé président du COJEP était “le général gbapai”, Serge Kuyo “ le général Tout terrain”. Ajouté à cela l’accoutrement de leurs membres (bandeau rouge à la tête, cagoule pour certains, le port du treillis) lors des manifestations, ou à des cérémonies lorsqu’un de leur secrétaire est convié, tout cela n’est pas fait pour créer un environnement propice aux études et à la cohésion sociale au sein de l’université. L’université est appelée “le temple du savoir” donc un lieu d’apprentissage qui a besoin de sérénité et de convivialité.  

CONCLUSION

L’idée de la création de la fédération estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire (FESCI) est partie d’une bonne intention, celle de lutter pour de meilleures conditions d’étude.

Cependant, avec l’évolution du temps, elle a dévié de sa trajectoire. Les responsabilités sont partagées, dès sa création le gouvernement d’alors issus du parti unique aurait dû privilégier le dialogue pour la satisfaction de leurs revendications en lieu et place des matraques.

 Il y a également le laxisme des différents régimes face aux actes de violence des membres de la Fesci. 

Les politiciens ont manigancé chacun de leur côté afin d’en faire leur instrument de lutte. Les étudiants eux-mêmes qui ont abandonné leur mission première pour s’intéresser aux ressources pécuniaires et au pouvoir sur les cités universitaires. Une sensibilisation des nouveaux responsables de la Fesci quant à la restructuration de cette organisation s’impose. Sensibiliser le gouvernement et les ministères en charge de l’école à s’asseoir autour d’une table avec les responsables de l’organisation afin de mener des réflexions pour une école ivoirienne de qualité.