Côte d’Ivoire : quand la superstition perturbe la cohésion sociale au sein de la population

Les populations du village d’Akradio, dans le département de Dabou, ont baigné dans une atmosphère trouble, le lundi 22 janvier 2024. Des jeunes en colère ont incendié le domicile d’une septuagénaire, suite à la débâcle des Éléphants face à la Guinée équatoriale.

Dans la nuit du lundi 22 janvier 2024, dame Lath Tuo Amélie, âgée de 70 ans, a annoncé être à l’origine de la défaite de l’équipe ivoirienne. Les Éléphants, en effet, venaient de perdre face au Nzalang national de la Guinée Équatoriale, sur un score de quatre buts à zéro, Une désillusion qui a conduit les pachydermes ivoiriens au bord de l’élimination. Ce qui a poussé des jeunes surexcités à incendier le domicile de cette dame du troisième âge. Les débordements qui en ont résulté ont plongé la localité dans une psychose.

De l’avis de ses bourreaux, dame Lath Tuo Amélie aurait laissé entendre, dans un village voisin, qu’elle est à l’origine du déboire des pachydermes ivoiriens. La victime aurait avoué avoir fait usage de procédés mystiques. Une confidence très vite dévoilée au grand jour, qui a provoqué le courroux des jeunes.

En Afrique, particulièrement en Côte d’Ivoire, les superstitions font partie du quotidien des populations. Dans un monde régi par la science, de tels présages peuvent paraître farfelus. Mais nos us et coutumes sont foncièrement imprégnés de fétichisme. Certaines prédictions ou pratiques, vraies ou fausses, qui en sont issues, sont malheureusement souvent porteuses de drame.

Le cas de dame Tuo Amélie constitue un exemple parmi tant d’autres. En pareilles circonstances, le bon sens commande de recourir aux lois en vigueur, traditionnelles ou modernes. Les garants de ces conventions pourraient entreprendre les démarches nécessaires, pour faire éclater la vérité, prendre les dispositions qui s’imposent. Il sera ainsi possible d’éviter certaines situations dramatiques.

Le deuxième type de superstition est celui qui a un impact sur la vie d’autrui, celui qui impacte négativement sur la cohésion sociale et qui suscite des discours envers une catégorie de personne ou sur une communauté. C’est le cas de cette vieille dame du village d’Akradio qui a vu sa maison être incendiée par les jeunes. Un député du même village a subi les effets collatéraux de cette affaire à travers le pillage de sa résidence.

Des tournois de football sont  organisés dans les villages pendant les vacances pour égayer les populations des zones rurales, les équipes de ces zones ont tendance à se tourner vers les talismans, les amulettes, ou la pratique de rituels spécifiques pour remporter le trophée. Cela conduit souvent à des bagarres et des conflits entre communautés villageoises parce que chacun soupçonne l’autre d’avoir envouté ses joueurs ou d’avoir blessé un joueur mystiquement pour obtenir la victoire.

 Ne dit-on pas qu’en Afrique, on ne meurt pas de mort naturelle. Lorsque quelqu’un décède dans une famille, cette mort est vite attribuée à une mort surnaturelle. Les personnes d’un certain âge avancé de la famille ou du village sont pointées du doigt. Sur la base des accusations de sorcellerie vraie ou fausse, des personnes et même des familles ont été expulsées de leur village voir battues à sang ou ont subi des rituels par exemple ‘’ la cérémonie du gôpô’’ pratiqué en pays béthé peuple de l’Ouest de la Côte d’Ivoire. Il s’agit de mettre une mixture dans les yeux des soi-disant auteurs de la mort du défunt afin de montrer sa culpabilité ou son innocence, malheureusement beaucoup en sont ressortis aveugle créant des frustrations dans les familles.  

Selon un analyste Philippe Laurent dans son article intitulé ‘’  Superstition : les méandres de l’esprit’’ la superstition  peut être influencée par divers facteurs tels que la culture, l’éducation, l’histoire personnelle et les expériences individuelles.

 Bien que certaines personnes considèrent les superstitions comme inoffensives ou amusantes, elles peuvent parfois conduire à des comportements irrationnels ou à des décisions irrationnelles basées sur des croyances non fondées. 

Dans une perspective scientifique, les superstitions sont généralement considérées comme des convictions sans fondement rationnel et sont souvent comme des phénomènes psychologiques liés à la recherche de sens et à la peur de l’incertitude.

Cette assertion s’illustre bien avec les superstitions liées aux albinos et aux enfants jumeaux. L’albinisme, identifié comme une maladie d’origine génétique, survient chez l’homme en raison d’une insuffisance dans la production du pigment appelé « mélanine » qui donne sa couleur à la peau. Dans certaines traditions locales, on pense que les organes des albinos sont dotés de pouvoirs magiques et qu’ils apporteront chance et santé à ceux qui en disposent. Pour cette raison, les personnes albinos peuvent être victimes de violences de la part de ceux qui, à travers eux, voudraient devenir riches etc. Ils peuvent être kidnappés et subir des amputations entraînant la mort. Les superstitions de ce type sont dangereuses pour la cohésion sociale et sont source de conflits au sein des communautés.

Conclusion

Les superstitions peuvent être sources de conflits si elles ne sont pas contrôlées. Les superstitions ont provoqué de dommage et de désolation au sein de la société. Il convient de sensibiliser les populations sur les risques de déchirures de la société à cause des superstitions. Alerter la population sur le deuxième type ou sur le deuxième niveau de superstition qui pourrait conduire à la stigmatisation d’une catégorie de la population.

Sidibé Yacouba