Les discours de haine  sexistes en ligne: une menace pour la vulnérabilité des femmes en Côte d’Ivoire

L’émergence des discours de haine en ligne constitue une préoccupation croissante à l’échelle mondiale, affectant de manière disproportionnée les femmes en raison de la vulnérabilité accrue qu’elles rencontrent dans cet environnement numérique. En Côte d’Ivoire, cette problématique prend une dimension particulière, alors que les discours de haine sexistes en ligne se révèlent être une menace significative pour la sécurité, le bien-être et la participation des femmes dans l’espace virtuel.

La notion de discours sexiste en ligne

Un discours sexiste en ligne fait référence à toute forme de langage ou de communication sur Internet qui véhicule des préjugés, des stéréotypes ou des discriminations basées sur le genre, visant spécifiquement à dévaloriser, discriminer ou opprimer les femmes ou les personnes en fonction de leur genre.

Selon le site média citoyen, “Entre le 20 et le 26 mai 2021, 101 discours de haine ont été collectés sur un total de 148 profils, pages et groupes Facebook“. Notamment une recrudescence de propos sexistes et injures à caractère sexuel (parfois très vulgaires) à l’intention des femmes. 

Ces discours peuvent prendre différentes formes, allant des commentaires offensants, insultes ou moqueries aux menaces, harcèlements en ligne, humiliations ou propagations de contenus visant à dénigrer ou à nuire à l’image des femmes. il peut également inclure des discours limitant les femmes à des rôles stéréotypes les déniant leur place dans certaines sphères de la société ou promouvant des attitudes misogynes et sexistes

Quelques cas de discours sexistes en ligne…

Nous assistons à des harcèlements en ligne. Cela peut se produire sur les réseaux sociaux, les plateformes de discussion, ou même par le biais de messages privés.

En plus, il faut noter la diffusion de contenus offensants ou dégradants sur la morphologie de femmes, l’exemple des courtes femmes. Ces contenus, images ou vidéos dégradantes ou sexistes visant à humilier ou à nuire à la réputation des femmes. Cela peut inclure des commentaires insultants sur leur apparence physique, leur intelligence, ou des messages visant à les dévaloriser.

À l’approche des fêtes de fin d’année (fête de noël et du réveillon), plusieurs propagations de stéréotypes et préjugés sexistes inondent la toile : Des discours qui renforcent des stéréotypes de genre, limitant le rôle des femmes à des tâches spécifiques ou suggérant leur infériorité par rapport aux hommes peuvent être diffusés en ligne véhiculant des idées discriminatoires.

Les femmes peuvent être visées par des menaces directes ou indirectes en ligne, allant des menaces de violence physique à des intimidations psychologiques, visant à les faire taire ou à les décourager de s’exprimer librement.

Ces manifestations de discours sexistes en ligne peuvent être préjudiciables pour les femmes en créant un climat hostile et en impactant négativement leur bien-être psychologique, leur liberté d’expression et leur participation à la vie numérique et sociale.

Il est important de noter que les discours sexistes en ligne sont souvent considérés comme une forme de violence verbale ou psychologique et peuvent avoir des effets profonds sur les droits, la dignité et la sécurité des femmes dans l’espace virtuel.

Ces discours peuvent avoir un impact néfaste sur les femmes, contribuant à créer un environnement hostile, générant des peurs, des angoisses et des conséquences psychologiques négatives telles que le stress, la dépression, voire l’isolement. De plus, cela peut limiter leur liberté d’expression et d’accès à l’information en ligne.

Que dit la loi ivoirienne contre les discours sexistes en ligne ?

En Côte d’Ivoire, il existe des lois et des dispositions légales qui visent à lutter contre les discours sexistes et les violences en ligne, bien que la législation spécifique concernant les discours sexistes en ligne puisse varier.

La loi ivoirienne contient des dispositions générales qui peuvent être utilisées pour réprimer les discours sexistes en ligne, notamment en ce qui concerne les violences faites aux femmes, la diffamation, les insultes et les menaces, même lorsqu’elles sont commises en ligne.

Par exemple, la Loi n° 2015-799 du 23 décembre 2015 sur la cybercriminalité en Côte d’Ivoire criminalise diverses activités liées à l’usage des technologies de l’information et de la communication. 

Cette loi punit notamment les diffamations, les injures et les menaces commises à l’encontre d’autrui via les moyens de communication électronique, ce qui pourrait inclure les discours sexistes en ligne

.De plus, la loi relative à la presse et à la communication audiovisuelle réprime la diffusion de contenus portant atteinte à la dignité humaine et interdit les propos incitant à la haine, à la discrimination ou à la violence fondée sur le genre, bien que son application spécifique aux discours sexistes en ligne puisse nécessiter des interprétations judiciaires

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Les autorités ivoiriennes ont également mis en place des initiatives de sensibilisation et des campagnes  visant à promouvoir l’égalité des genres, à lutter contre les violences faites aux femmes et à sensibiliser contre les discours sexistes en ligne. Notamment le lancement récent de la campagne « ≠ENLIGNETOUSRESPONSABLE » pour un usage responsable des médias sociaux.

La position des médias et des organisations de la société civile

La position des médias ivoiriens face aux discours sexistes en ligne peut varier selon les organes de presse, les lignes éditoriales et les initiatives individuelles. En général, de nombreux médias tendent à promouvoir l’égalité des genres et à condamner les discours sexistes en ligne.  

Par ailleurs, des formations sont initiées pour former les médias et société civile à la sensibilisation sur les discours sexistes et à l’éducation aux médias sociaux.

Certains médias ont des politiques éditoriales strictes concernant les contenus en ligne, mettant l’accent sur le respect des droits des femmes et la modération des commentaires pour éviter les discours haineux tel que le Média citoyen qui promeut une visibilité positive des femmes et des jeunes dans le contenu médiatique, la parole aux jeunes, aux expertes et aux citoyennes ordinaires. 

Le  Réseau des professionnels de la presse en ligne de Côte d’Ivoire (REPPRELCI) est  engagé   dans des partenariats ou soutenir des campagnes visant à lutter contre les discours sexistes en ligne, en collaboration avec des organisations de la société civile ou des institutions gouvernementales.

l’Union nationale des journalistes de Côte d’Ivoire(UNJCI)  initie et multiplie des formations à l’intention de ses membres en vue de renforcer leurs capacités sur le digital.

Tout comme les professions des médias , la société civile sont engagés dans la lutte contre les discours sexistes en ligne, tel est le cas de l’Initiative Citoyenne pour l’éducation aux médias sociaux (ICEM CI), qui forme, éduque et sensibilise les populations ivoiriennes sur le bon usage des médias sociaux en vue de consolider la paix et la cohésion sociale.

Au total, la sensibilisation, l’éducation et la responsabilisation des médias sont des aspects clés pour encourager une couverture équilibrée et respectueuse des genres en ligne. 

En conclusion, les discours de haine sexistes en ligne représentent une menace palpable pour la vulnérabilité des femmes en Côte d’Ivoire, créant un climat d’hostilité et de discrimination dans l’espace numérique. Ces discours alimentent des préjugés nuisibles, perpétuent des inégalités de genre et compromettent la participation active et sécurisée des femmes dans la sphère virtuelle.

Comme actions, nous proposons la sensibilisation et l’éducation  aux médias à travers des campagnes pour informer sur les conséquences néfastes des discours sexistes en ligne, en mettant l’accent sur l’égalité des genres et le respect mutuel.

Cette action implique également le fait de former les modérateurs de contenus et les professionnels des médias sociaux pour identifier et traiter les discours sexistes de manière efficace et éthique.

Aussi Travailler en partenariat avec les plateformes numériques pour élaborer des politiques claires et des directives pour modérer et supprimer les contenus haineux tout en assurant la liberté d’expression, c’est aujourd’hui la tâche du Groupe Meta

Former les modérateurs de contenus et les professionnels des médias   pour identifier et traiter les discours sexistes de manière efficace et éthique.

Encourager la création de contenus positifs et de contre-discours pour contrer les messages sexistes et promouvoir des valeurs d’égalité et de respect, tel a été le cas lors des élections régionales avec l’Icem ci.

Dernière action : Plaider auprès des autorités ivoiriennes pour intégrer l’éducation aux médias dans le programme scolaire dès l’école primaire.

Marina Konan