La perception virtuelle des minorités sexuelles, souvent désignées sous le terme « woubi », se trouve confrontée à une série de discours haineux dans les espaces numériques. Cette appellation, utilisée pour décrire les individus appartenant aux communautés LGBTQ+, est régulièrement la cible de préjugés et de stigmatisation en ligne. Ces discours de haine prennent différentes formes, allant de commentaires malveillants à des attaques verbales, impactant l’expérience et la sécurité des personnes LGBTQ+ dans le cyberespace. Face à cette réalité, l’émergence de ces discours haineux soulève des préoccupations majeures quant à la cohabitation harmonieuse et au respect des droits de ces minorités dans le monde virtuel.
Qui est « woubi » en Côte d’Ivoire.
En Côte d’Ivoire, la genèse de la communauté LGBT (Lesbienne, Gay, Bisexuel, Transgenre) a des racines similaires à celles d’autres régions du monde. La communauté LGBT ivoirienne a commencé à prendre forme avec l’émergence de mouvements sociaux et de groupes de personnes identifiant leurs orientations sexuelles ou identités de genre en dehors des normes traditionnelles.
Les associations ont emprunté un lexique occidental « LGBTQ », « genre », etc. qui ne correspond pas forcément aux réalités locales. Les gens de l’association utilisent les termes locaux, car ils font partie de la communauté. Il y a un lexique homosexuel, le ‘Woubi-Can’, qui est utilisé jusqu’au Mali, Burkina, Guinée, commente N’Jaboué le conseiller psychosocial d’Alternative Côte d’Ivoire, ONG qui œuvre pour Une Côte d’Ivoire dans laquelle les droits humains sont respectés. Ceux liés à la santé, au genre et à l’orientation sexuelle.
La communauté dit “woubi “ appartient à la communauté LGBT+. Et désigne les personnes ayant des orientations sexuelles ou des identités de genre diverses. En Côte d’Ivoire, des personnes connues ou des célébrités sont taxées sur la toile comme des “woubi“, terme à connotation péjorative.
Les woubi assimilés à des personnes qui enfreignent à la moralité
Les termes comme « woubi » sont souvent utilisés en ligne pour stigmatiser et associer à des personnes considérées comme violant les normes de moralité établies. Cette assimilation crée une marginalisation injuste et alimente la discrimination envers les membres de la communauté LGBT+, perpétuant ainsi des préjugés préjudiciables. Cela constitue une menace pour la cohésion sociale.
Les réseaux sociaux, espace privilégié de ces discours de haine
Sur la toile, les violences dirigées contre les minorités sexuelles sont fréquentes. Les minorités sexuelles peuvent être « huées, victimes d’injures et de moqueries. Elles sont parfois traitées de personnes maudites.
La position de l’Etat de Côte d’Ivoire…
La Côte d’Ivoire est un des pays africains où l’homosexualité n’est pas criminalisée, l’homophobie n’en est pas moins présente. Sauf dans certains lieux de socialisation fréquentés par des homosexuels, les membres des minorités sexuelles doivent dissimuler leur orientation sexuelle afin d’éviter les injures, les humiliations, la discrimination et la violence.
Selon les Country Reports 2012, L’État n’exercerait pas de discrimination fondée sur l’orientation sexuelle en ce qui concerne l’emploi, les personnes apatrides, le logement, l’accès à l’éducation ou l’accès aux services de santé.
D’après le site Internet Gay Afrique, qui traite d’homosexualité en Afrique francophone, il serait « possible de vivre son homosexualité à Abidjan même si cela reste toujours un sujet tabou dans d’autres villes ivoiriennes.https:
Dans le paysage médiatique ivoirien, des pasteurs et influenceurs exercent une influence significative, mais parfois leurs discours peuvent contribuer à propager des messages de haine et d’homophobie. Ils peuvent également véhiculer des préjugés et des attitudes hostiles envers la communauté LGBT, leurs discours peuvent nourrir un climat d’homophobie et de discrimination au sein de la société ivoirienne.
Awawalé, un festival sur la situation des personnes LGBT+ voit le jour à Abidjan
L’émergence du festival Awawalé en Côte d’Ivoire a marqué un tournant crucial en offrant une plateforme de visibilité et de reconnaissance pour les réalités et les défis rencontrés par les personnes LGBT dans le pays. L’objectif, explique le directeur exécutif de l’ONG Gromo, Brice Donald Dibahi, est de promouvoir le savoir-faire des personnes LGBT et le vivre-ensemble : « Le premier jour, on a la conférence de visibilité LGBTQ. Après la conférence, on a l’exposition des métiers où on fait la promotion du savoir-faire de notre communauté. L’exposition sert à valoriser les talents des membres de notre communauté et valoriser les jeunes entrepreneurs qu’il y a dans notre communauté pour montrer aussi notre savoir-faire. On apporte un plus au développement de notre pays. On apporte une plus-value à l’émergence de ce pays. »
Le festival Awawalé représente un espace de dialogue et de sensibilisation, contribuant ainsi à une meilleure compréhension et acceptation de la diversité sexuelle et de genre.
Dans la veine, Le magazine Meleagbo, la première revue LBGT+ d’Afrique de l’ouest francophone voit le jour et entend mettre en valeur des icônes promouvant la culture, l’histoire et les réussites de cette communauté. Un pas en avant sur un continent où une trentaine de pays condamnent et répriment les attaques sur les personnes LGBT+.
Par ailleurs, une webradio destinée aux communautés LGBTI+ en Côte d’Ivoire, Radio Tilé a été lancée par l’ONG Initiative Tilé. L’objectif c’est de permettre aux minorités sexuelles d’avoir un espace pour s’exprimer librement
.https://information.tv5monde.com/afrique/video/cote-divoire-radio-tile-lecoute-de-la-communaute-lgbti-2657521
La position mitigée des médias ivoiriens
La position des médias ivoiriens vis-à-vis de la communauté LGBT+ est variée. Certains médias adoptent une approche respectueuse et impartiale en traitant les questions liées à la diversité sexuelle et de genre avec équité. Cependant, d’autres médias peuvent malheureusement perpétuer des préjugés en diffusant des discours discriminatoire et stigmatisant à l’égard de la communauté LGBT+, contribuant ainsi à la marginalisation et au renforcement des clichés négatifs.
L’UNJCI (union nationale des journalistes de Côte d’Ivoire), la faîtière des journalistes ivoiriens n’a pas encore réagi sur la question. Mais en son article 14, le code de déontologie du journaliste ivoirien dispose que le journaliste doit « S’abstenir de toute atteinte à l’éthique sociale : incitation au tribalisme, à la xénophobie, à la révolte, à la violence et aux crimes et délits ; outrage aux bonnes mœurs, apologie de la guerre, des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité.
Conclusion
La perception virtuelle des personnes désignées comme « woubi » en Côte d’Ivoire est souvent altérée par des discours de haine en ligne, compromettant ainsi la cohésion sociale et perpétuant la stigmatisation et la discrimination au sein de la société. Ces discours, bien qu’émanant d’un espace virtuel, impactent profondément les interactions sociales et exacerbent les tensions, compromettant ainsi la construction d’une société inclusive. Ces discours, amplifiés par les plateformes numériques, reflètent une lacune dans la compréhension et l’acceptation des différences sexuelles et de genre.
La perception de la communauté LGBT+ en Côte d’Ivoire reste complexe et diverse au sein de la société ivoirienne. Traditionnellement, la société ivoirienne est influencée par des valeurs culturelles, religieuses et sociales conservatrices qui peuvent influencer négativement la perception des personnes LGBTQ+.
Pour avancer vers une société plus inclusive, il est impératif de promouvoir des dialogues constructifs, de sensibiliser contre la stigmatisation et de soutenir activement la diversité au sein de la communauté, tant virtuelle que réelle.
Pour favoriser une meilleure inclusion de la communauté LGBT+ ou “woubi “ en Côte d’Ivoire, plusieurs actions positives peuvent être envisagées : Sensibilisation et éducation, organiser des campagnes de sensibilisation dans les écoles, les entreprises et les communautés pour promouvoir la tolérance, le respect et la compréhension envers les personnes LGBT+.
Aussi plaider pour des lois et des politiques qui protègent les droits des personnes LGBT+ contre la discrimination et la violence, ainsi que pour l’égalité des droits en matière de mariage, d’emploi et de logement. Éducation aux droits humains : pour favoriser la compréhension et le respect des différences.
Ces actions peuvent contribuer à créer un environnement plus inclusif et respectueux envers la communauté LGBT+ en Côte d’Ivoire, par ricochet “les woubi“.
Marina Konana