Les attaques contre les mères célibataires sont très récurrentes sur les réseaux sociaux, notamment Facebook. Pourtant, selon une étude de la Fondation mère célibataire, on dénombre 1000 mères célibataires en Côte d’Ivoire.
« Si tu es un jeune célibataire et que tu n’as pas d’enfant, je te déconseille de te marier avec une femme qui a déjà des enfants… Si un homme a déjà des enfants, il peut se mettre en couple avec une mère célibataire ».
Ces propos de l’influenceur ivoirien, Juste Crépin Gondo» lors de l’émission « les hommes d’ici », réalisée en juillet 2022 sur la chaîne de télévision NCI ont multiplié les propos haineux inexplicables à l’encontre des mères célibataires sur les réseaux sociaux.
Depuis lors, ces femmes sont devenues de plus en plus l’objet de conversations dévalorisantes. Le 18 août 2023, la page Anti-coach publiait ceci : « Mieux vaut être un frustré, complexé, petit dans la tête, faux homme, vivant qui fuit les mères célibataires, qu’un vrai homme mature qui perdra sa vie et ses finances à cause d’elles…. APPRENEZ OU PÉRISSEZ ! ». Cette publication a enregistré au total 602 réactions, 146 commentaires et 43 partages.
Bien avant, c’est-à-dire le 9 août 2023, l’internaute appelé « Gliceman Yôbi Yôbi », indiquait dans le groupe « Observatoire Démocratique de Côte d’Ivoire (renaissance) », qu’il « préfère investir dans l’élevage que d’élever l’enfant d’une mère célibataire alors que le père de cet enfant se balade en paix ». Il a enregistré plus de 500 réactions, plus de 600 commentaires et 360 partages.
Le 02 septembre 2023, c’est Claude Elouti via le groupe « Kerel Mature » qui, cette fois, invitait les hommes en couple avec des mères célibataires à contribuer financièrement aux scolarités des membres de leur famille au lieu de prêter main-forte à leur partenaire. « Frère, scolarité tu veux verser pour l’enfant de cette mère célibataire peut servir à scolariser un de tes neveux ou nièces », a-t-il publié.
Pourquoi ces propos haineux contre les mères célibataires
Les auteurs de ces discours haineux justifient leurs actes par le fait qu’ils sont aussi libres d’avoir leur critère de choix, de donner des conseils dans notre contexte qui prône la liberté d’expression.
Pour d’autres, le critère de choix des mères célibataires est biaisé, car en réalité, elles n’ont d’yeux que pour leurs progénitures. Ce qui sous-entend qu’elles sont à la recherche d’un père pour leurs enfants. Ils estiment donc que les femmes qui se plaignent font de la manipulation pour atteindre l’objectif recherché.
Ces propos haineux peuvent être dangereux
Pour l’équilibre de leur progéniture, les mères célibataires font déjà face à de nombreux défis au quotidien. Il s’agit des difficultés émotionnelles, économiques, des excès de stress dû à la surcharge des responsabilités, le défi de concilier vie familiale et professionnelle.
À cela s’ajoutent les préjugés de la société « Au XXIᵉ siècle, on pourrait penser que nous sommes tous très libéraux et que nous acceptons la diversité des structures familiales, mais ce n’est pas tout à fait le cas. Il y a toujours des gens pour dire des phrases comme « quel dommage qu’un enfant grandisse sans père » ou « il a besoin d’une figure paternelle ». Mais tout le monde ne se rend pas compte que cet enfant peut être beaucoup plus aimé et désiré que d’autres qui ont un père dans leur vie », explique l’Activiste Angèle La Marquise, Administratrice du Groupe Club des Mères Célibataires Dynamiques.
Cet acharnement, il faut le signifier, pourrait aussi faire grimper les chiffres d’infanticides et d’avortement. Ce qui est formellement interdit par la loi ivoirienne.
Déjà que les difficultés actuelles engendrent ces extrémités, selon la Présidence de la Fondation mère célibataire ; Belinda Nango.
«Il n’y a pas longtemps, les médias se sont fait l’écho d’un cas d’infanticide. J’en ai souri, parce que j’en avais été saisie auparavant… Il arrive que des enfants meurent, parce que les mères célibataires n’ont pas d’argent pour subvenir à leurs besoins. Elles subissent beaucoup de choses qui, quand on les écoute, peuvent gâcher une journée », a-t-elle confié au journal L’avenir.
Aussi, la charge émotionnelle peut être de plus en plus lourde, surtout pour ces femmes et jeunes filles devenues mères célibataires par la force des choses dont le viol.
Réduire les propos haineux à l’endroit des mères célibataires
Le discours de haine ou « hate speech » en anglais, désigne un type de discours qui attaque une personne ou un groupe de personnes sur la base de caractéristiques divers (couleur de peau, ethnie, âge, sexe, orientation sexuelle, religion, etc.). Il peut conduire à des suicides, lynchages, fusillades de masses, guerres, crimes de masses…
C’est le cas de la page Facebook « succès » qui, au travers d’une vidéo accompagnée de messages à caractère xénophobes et d’appels à s’attaquer à l’intégrité physique de la population nigérienne vivant en Côte d’Ivoire, avait causés d’énormes dégâts, en mai 2021.
Bien que le gouvernement ivoirien ait pris des dispositions avec les articles 62 et 66 de la loi N° 2013-451 du 19 juin 2013 relative à la lutte contre la cybercriminalité , et que plusieurs organisations, notamment Indigo Côte d’Ivoire, le Réseau des Femmes Web-activistes contre les Discours de Haine (REFWADA) et l’Observatoire Ivoirien des Droits de l’Homme (OIDH) mènent des activités de sensibilisations en ligne, les discours de haine ne s’estompent point.
Il convient alors pour les organisations de multiplier les actions de sensibilisation en ligne. Le gouvernement quant à lui, devrait prendre des mesures plus spécifiques aux discours portant atteinte à la dignité humaine et aux personnes.